Chapitre 59

Enki était dans une grande lande, toute blanche. Il était seul et on ne voyait rien à l'horizon. Il avait une sentation étrange, mais n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Soudain, son esprit s'éclaira : il n'avait plus mal aux articulations. Un groupe de corbacs passa au-dessus de sa tête. Il la leva, et quand il la rabaissa, il eu un choc : Sylphais se tenait devant lui.

• Comment t'as fait ça ? demanda l'enutrof. Invisibilité ?
• Non, répondit le sram d'une voix glaciale. Je suis juste là pour te faire psychotiser à mort.
• Comment ça ?
• Tu le verras bien...

Il pointa un doigt crochu derrière l'enutrof. Il se retourna doucement, et ce qu'il vit le glaça d'effroi. Une armée entière d'arakne arrivait à toute vitesse. Lui qui était araknophobe à l'extrême. Il se mit à claquer des jambes et des dents très fort. Et quand les araknes arrivèrent sur lui, il s'envola dans les airs. Les corbacs le tirèrent vers le haut. Il soupira d'aise, mais ce soupir disparut très vite quand il remarqua la hauteur à laquelle ils étaient. Tous ses compagnons volaient autour de lui, en tournant. Chacun parlait à tour de rôle d'un voix désarticulée :

• Tu veux le livre pour toi tout seul...
• Tu veux savoir ce qu'il y a dedans...
• On va te le montrer...
• Mais il faudra être courageux...

Ils continuèrent cette longue litanie. Une énorme livre avec sur la couverture un dragon se présenta à ses yeux. Ses pages défilèrent à toute allure, ne lui laissant voir que bribes, des choses pas très rassurantes, au sujets de malédictions, de dragons, et du Mal Absolu, des choses qui n'étaient que des sornettes aux yeux et oreilles d'Enki. Quand soudain il vit Léonard sur le livre. Il poussa un couinement. Un couinement qui'll connaissait très bien. Un couinement qu'il poussait quand il ordonnait à quelqu'un de lâcher quelque chose...
Les corbacs désserrèrent leurs serres, et Enki tomba d'une chute vertigineuse dans les araknes qui s'ammassaient à l'endroit précs ou il devait tomber. Il poussa un cri...

...Et se réveilla en un sursaut, au milieu de la carriole, dans les patates. Tout le monde le regardait attentivement.

• Je ne sais pas le venin qu'inocule le moskito qui m'a piqué dans le cou, dit Enki, mais il est étrange. Très étrange.
• Quel moskito ? demanda Flauta. Je n'ai remarqué aucune piqûre à votre cou.

Enki se passa la main dans son cou. En effet, il ne sentait rien du tout. Cela l'effraya encore plus. Il n'avait eu ce genre de cauchemar qu'une seule fois dans sa vie. Cela annonçait quelque chose d'important, un grave tournant. Il devait en faire part à ses compagnons.

• Mes enfants, (il commençait toujours ses phrases ainsi quand il devait annoncer quelque chose de grave), j'ai bien peur que ce livre ne renferme pas que de choses. Il pourrait même être un grand danger. Entre de bonnes mains, il causerait la perte de son possesseur. Entre de mauvaises mains, il pourrait faire périr le monde entier. C'est d'ailleurs pour ça qu'il est si convoité. Pour bien comprendre, il faut que je vous raconte une antique légende, connue uniquement des Anciens. Et il va falloir m'écouter !

Cette dernière phrase était surtout addressée à Sylphais. Tout le monde se mit confortablement.

• Il y a une légende au sujet d'un très grand livre qui cache ses airs derrière une bête couverture et un sujet apparemment totalement ennuyeux. C'est d'ailleurs pour ça que ce livre à été délaissé lors du déluge, contrairement à bon nombre d'autres livres. À cette époque, on croyait que c'était un bête livre d'Histoire barbant. Heureusement qu'à notre époque, les mentalités ont changées. Toujours est-il que ce livre possède un secret. Un grand secret. Encore plus grand et plus secret que le secret de la Fontaine de Jouvence, secret pourtant très secret. Il permettait de donner un pouvoir si extrême à celui qui le connaîtrait que même les dofus ne pourrait rien contre lui. Je pense qu'Ogrest veut s'en emparer. Car il est un peu vulnérable lorsqu'il a les dofus. Enlevons-lui les dofus, il redevient un bête ogre. Ce n'est pas une mince affaire, mais c'est faisable. Tandis qu'avec ce pouvoir, il en sera impregné, et plus rien ne pourra le contrer. Ce sera fichu et sans espoir. Le Wakfu serait boulversé, peut-être jusqu'à ce que le monde soit totalement désintégré. Mais même à cela, Ogrest survivra.
• Alors, demanda Sonemth, il faudra détruire le livre ?
• Boudiou, sûrement pas ! Pour avoir ce pouvoir, il faut suivre certains rituels, faire un pèlerinage. Bref, si nous sommes assez forts d'esprits, nous pourrons nous empêcher nous-mêmes de succomber à la tentation. Mais, en dehors de ça, c'est un excellent livre d'histoire sur les Dofus et les Dragons.
• Vous semblez en savoir un peu trop pour un simple enutrof, dit Sylphais d'une voix glaciale (comme dans son cauchemar).
• C'est vrai, je vous ai caché quelque chose...

Tout le groupe se figea. Lui, ce petit enutrof malade, gourmand et maladroit ? À part la combinaison de son coffre, il ne semblait avoir aucun grand secret.

• Je fais partie d'une ancienne factions, qui possède encore plus de savoirs que les Disciples d'Otomaï. Elle remonte en-delà du deluge. Du temps des Dofus. Elle possède tous les secrets que le monde porte en son sein depuis sa formation, ou presque. Ce sont les Anciens. Litten, le chasseur de dragons, en était un. Pas des plus brillants, je vous l'accorde. Le plus grand était Acidrik Fenlapanse, qui a réécrit toute l'Histoire de l'humanité. J'en faisais partie, et c'est pourquoi je connais tant de secrets. Je dit bien était car je n'e fais plus partie : la soif de pouvoir des Anciens les corrompaient. Ils voulaient tout. Tout ! Je les ai quittés, et j'ai continué mon petit train de vie, en tant que conteur, gemmologue et aventurier. Dans les quêtes, ce n'est pas la récompense qui m'interresse. Enfin, si, un peu. Mais c'est surtout l'expérience qu'on en retire. C'était l'idéologie des Anciens. Plus maintenant. Mais, à présent, il faut repartir. Un des deux groupes qui est parti vers le Nord est un groupe de partisans d'Ogrest. Je soupçonne l'autre groupe d'être des mercenaires engagés par les Anciens. Il faut partir au plus vite. Ils ne possèdent pas de soutien de l'Etat, mais d'autre plus grands. Je ne les connaissais pas, je ne faisais pas partie du Grand Cercle Fermé des Douze, la plus haute distinction dans les Anciens. Ne perdont pas une seconde, tout le monde en voiture, et que ça saute !

Enki se mit aux rennes de la cariole, et se prépara à partir. Il n'avait pas envie de se venger des Anciens. Mais il lui fallait ce livre pour empêcher le monde de sombrer dans le chaos, et au plus vite !